« L’intelligence artificielle est probablement le sujet le plus important sur lequel l’humanité ait jamais travaillé. »
Sundar Pichai, CEO de Google
Nous avons eu l’opportunité d’échanger en toute simplicité avec Raphaël Goumain, Directeur Marketing de Google France. Nous connaissions évidemment déjà très bien Google et avons participé en tant qu’intervenants ou en tant que visiteurs à plusieurs événements de l’entreprise. Mais nous étions curieux d’avoir le retour honnête d’un Googler qui fête ses 10 ans d’ancienneté dans l’entreprise.
Plusieurs sujets ont ainsi été abordés pendant l’heure et demi que nous nous étions donnée, parmi lesquels celui de la culture. En effet, nous savons que dans un contexte d’accélération numérique notamment, la culture peut constituer un avantage ou un frein énorme pour l’entreprise. Mais alors, chez Google, qu’est-ce qu’être Googley ?
Selon Raphäel Goumain, cela part d’abord d’une dynamique profondément humaniste. Chaque personne de l’entreprise est attachée à une véritable bienveillance, et à la notion de bien commun (le fameux « Don’t be evil »). Au coeur du réacteur, la mission profonde de l’entreprise, fixée par ses deux fondateurs lors de la création : « Organiser les informations à l’échelle mondiale dans le but de les rendre accessibles et utiles à tous ».
Google ne se voit pas comme une entreprise traditionnelle, mais se ressent plutôt comme un campus où se croisent les nationalités, les personnalités, les diversités… Sur ce dernier sujet, Raphaël Goumain nous parlera de la logique de Diversity Inclusion, qui induit pour lui l’implication de tous. Si on veut incarner le sens de l’entreprise, les valeurs doivent être portées par l’intégralité des salariés. Cela passe entre autres par de la formation (passage obligatoire pour tout nouveau Googler). Il note néanmoins que le sujet de la diversité est une lutte permanente, avec l’obligation parfois d’inclure d’emblée des profils dans les jeux de données pour éviter des biais cognitifs menant à une forme d’exclusion.
La culture Google a aussi longtemps été dans l’idée que la perfection n’était pas nécessaire, et que 80% du boulot effectué sur un produit était acceptable. D’où les nombreux lancements en beta, et la sensation parfois du public qu’il s’agissait de « plantages », là où Google voyait surtout de l’expérimentation pour le bien commun (ex : les Google Glass). Mais aujourd’hui cela n’est plus possible car les gens attendent des produits parfaits. Ainsi, la culture de Google est impactée, au même titre que celles de grandes entreprises françaises, par l’évolution des attentes des consommateurs, et par la montée en puissance de leur niveau d’exigence.
Google doit aussi gérer aussi bien les sauts technologiques que leurs impacts sociologiques : sur le sujet de l’intelligence artificielle, par exemple, cela impose plus de transparence et de responsabilité. Raphaël Goumain rappelle d’ailleurs qu’au coeur de nombreux produits déjà bien en place, il y a déjà de l’intelligence artificielle et que cela ne pose aucun problème.
Pour faire un parallèle, nous (SYSK) pouvons évoquer le sujet du GPS dans les smartphones : à leur sortie, il y eut une levée de boucliers de la part des utilisateurs (comment accepter que l’on puisse être suivis constamment ?). Pourtant aujourd’hui, difficile de faire 500 m sans sortir son smartphone et lancer l’application de cartographie. Les utilisateurs ont oublié leurs craintes initiales car l’utilité de l’outil les a surpassées.
Concernant le métier de Google aujourd’hui, il est d’accélérer la transformation côté utilisateurs, business, pouvoirs publics… Google conserve en son coeur de continuer à délivrer la promesse initiale, et d’être à la hauteur des nouveaux enjeux. Chaque Googler s’en sent ainsi responsable. L’accès à l’information est vue comme un droit pour chaque individu de la planète, en ne créant aucune discrimination à l’entrée. Dans sa propre équipe, Raphäel Goumain nous expliquera qu’il valorise surtout les profils empathiques, à tonalité entreprenariale, avant toute autre considération. De manière générale, on notera un valorisation des initiatives, une confiance profonde des directeurs, et la volonté de toujours sortir du cadre.
Nous aborderons ensuite le sujet des assistants personnels. Raphaël Goumain nous évoquera le concept d’ambient computing, soit un monde où les machines comprennent le monde et réagissent pro activement en fonction de la donnée détectée. SYSK mentionnera l’imperfection actuelle des assistants vocaux, là où Raphaël Goumain précise qu’il faut apprendre à échanger avec ces nouveaux outils. Ils permettent d’aider à des tâches du quotidien (maison connectée, divertissement…), mais ils ne sont pas (encore) magiques. Il faut créer des routines, pour permettre à l’assistant de devenir un véritable compagnon du quotidien. Google met beaucoup d’énergie et de moyens pour rendre l’assistant par exemple plus « français ». Ce sont ainsi des storymakers, des cinéastes, qui lui donnent une humeur et une personnalité.
Bien sûr, tout cela n’empêche pas une certaine anxiété irrationnelle face à ces technologies qui semblent pouvoir nous écouter à n’importe quel moment. Mais d’un point de vue technique et rationnel, Raphaël Goumain nous explique que l’approche est celle de la « privacy built-in », et que Google n’a aucun intérêt à espionner ses utilisateurs (toute suspicion ou découverte sur le sujet serait désastreuse en termes de réputation et de confiance). Google, là encore, prône la transparence, la sécurité, et a instauré sur ses produits des « Privacy Check-up » et « Security Check-up » pour que chaque utilisateur exploite les produits et services en pleine conscience.
Pour terminer, vient le sujet de la formation. Là où on pourrait soupçonner Google d’accompagner les TPE et PME dans le but de leur vendre surtout du Google, la réalité est un peu différente. La formation au numérique a démarré en 2012, en région PACA. Quelques 7 années plus tard, 300.000 personnes ont été formées, sur base de règles éthiques strictes : aucune initiative à but commercial dans ce programme et la mise en avant de l’ensemble des solutions existantes (incluant celles de confrères comme Facebook par exemple ou des solutions gratuites de bureautique). Tout cela s’appuie aussi sur quelques 200 partenariats mis en place en régions (avec des CCI notamment et des pouvoirs publics). À noter aussi que ce programme est une spécificité française, qui a parfois interrogé la maison-mère américaine sur le ROI de l’opération… ce qui n’a pas empêché de mener à bien ce projet d’accompagnement si nécessaire aux plus petites de nos entreprises.
En conclusion, nous avons apprécié cette discussion informelle avec l’un des acteurs majeurs de l’Internet, véritable locomotive de l’innovation.