Tendances RH 2020 : passé, présent, futur avec Alexandre Pachulski de Talentsoft

« Ce n’est pas l’outil qui va changer la culture. »
Alexandre Pachulski

En tant que consultant en accélération digitale et analyste, j’ai la chance de rencontrer des personnes passionnantes et passionnées par leur métier. Alexandre Pachulski en fait partie. Co-fondateur et Chief Product Officer de Talentsoft, le leader européen des applications Cloud de gestion des talents et de la formation, il a un parcours varié et cohérent, que nous allons découvrir ensemble (à noter que cet entretien a été mené pré-confinement).

Une adolescence bercée par le cinéma et la science-fiction

Durant ses jeunes années, la vie d’Alexandre Pachulski tournait autour de deux grands pans : il était amoureux de cinéma et de science-fiction. Sur ce dernier point, il avait notamment en tête une date clé, 2019, issue du film Blade Runner, et il se projetait dans le futur sur cette base. Est-ce qu’on aura vraiment des voitures qui volent ? Il trouvait le futur dystopique, était marqué par des films comme Highlander 2 avec « le ciel que l’on ne voyait plus », où l’humain était asservi et où la nature semblait disparaître peu à peu.

Très optimiste vis-à-vis de la technologie, il rêvait d’un humain qui serait libéré du travail, et était sûr que ce serait le cas d’ici 2020 : « J’étais persuadé qu’on ne connaitrait plus ce qu’on connait aujourd’hui« . Alexandre a probablement le même travers que moi, à savoir être trop dans le futur par rapport à la réalité qui nous entoure, et trop optimiste vis-à-vis de la réalité de nos sociétés. Cela ne l’a pas empêché d’aller néanmoins vite. Bien avant le buzz autour de l’intelligence artificielle, il obtient à la fin des années 90 un doctorat en IA symbolique (avant cela, il avait obtenu un DEA en Sciences Cognitives). Entrepreneur depuis le début de son parcours professionnel, il crée un cabinet de conseil RH, avant de se lancer au bout de 8 ans dans l’aventure Talentsoft, un des leaders du SaaS RH.

Comment percevoir le présent ? Quelles tendances RH pour 2020 ?

Il l’avoue aisément, le présent ne ressemble pas à ce qu’il imaginait tant en termes de technologie que de social, et je le rejoins sur ce point. Pourtant il voit dans l’année 2020 une lueur d’espoir, avec une réflexion autour de la galère du travail et le bénéfice qu’on en retire. Alexandre souhaite montrer qu’on peut travailler différemment, et affirme que l’on n’est pas obligé de prendre les gens pour des ressources.

Quand on parle de transformation ou d’accélération digitale, l’outil n’est pas une baguette magique, mais il permet aussi de révéler des évolutions nécessaires : il change le rapport au management, à la collaboration, au principe de gouvernance, à la manière de fixer un objectif… De plus, la montée en puissance de l’approche technologique via l’intelligence artificielle, la robotique, l’IoT, oblige à se remettre en question en tant qu’humain.

« On n’a jamais parlé autant d’humain que depuis qu’on parle de transformation digitale« 

Nous sommes face à une grande inconnue : le nombre de fonctions courantes en 2030 qui n’existent pas encore,  avec une école qui continue néanmoins à former comme elle l’a toujours fait. Faut-il former aux métiers d’aujourd’hui, ou à ce qui arrivera demain ? Dans cette optique, Alexandre Pachulski est d’ailleurs engagé dans L’autre école, une école bilingue français-anglais pour les 3 – 12 ans. On y paye selon ses revenus et on y associe créativité, collaboration, méditation et ouverture aux autres.

Concernant les fonctions qui vont disparaître, Alexandre Pachulski souhaiterait que l’on travaille à la mise en correspondance entre les envies des personnes et leur place dans la société. Foncièrement, beaucoup de personnes ne savent pas ce qu’elles ont envie de faire, ou même ce qu’elles peuvent faire. L’école n’a en effet pas poussé au questionnement sur soi : comment je vais m’y prendre pour la suite ? Quelle est la mise en correspondance ? Quelles sont les compétences nécessaires pour tirer profit de la vague d’innovation ? Les RH doivent aider à répondre à ces interrogations, et valoriser les collaborateurs plutôt que de penser à les remplacer. À l’automatisation, il faut répondre avec l’engagement. La montée en puissance de l’intelligence artificielle pousse l’humain dans ses propres retranchements : il faut moins s’interroger sur ce que l’on veut faire, que sur ce que l’on veut être. Si on fait aujourd’hui un job de robot, il y a de fortes chances d’être à terme remplacé par un robot.

L’intelligence artificielle doit être une aide, qui nous permettra de mieux nous connaître. Il est essentiel aussi pour cela d’éviter les biais. Par exemple, en 2018, Amazon a dû désactiver une IA recruteuse qui discriminait les femmes à l’embauche. Cela était la conséquence de pratiques internes humaines historiques, qui avaient été répercutées sans en avoir conscience sur l’IA.

L’IA ne sera ainsi d’aucune utilité si l’on ne dispose pas des bonnes données. Elle doit aussi servir de grands buts : utiliser la donnée pour sauver quelqu’un d’un infarctus est noble, mais quel gâchis quand elle est utilisée pour mieux vendre des meubles. Elle a aussi un intérêt pour mieux orienter le recrutement, la formation, pour aider les collaborateurs à mieux évoluer.

Pour Alexandre Pachulski, la décennie actuelle est la plus cruciale de celles qu’il a vécues jusqu’ici : le sujet de la donnée est central, et cela va impacter le futur.

Et dans 10 ans ?

Voici quelques éléments de réflexion pour les années 2030 selon Alexandre Pachulski :

  • En 2035, on ne travaillera plus pour de l’argent, les personnes seront plus apaisées en trouvant leur ikigai, soit leur raison d’être ;
  • Les robots seront nos collègues, ils créeront eux aussi de la richesse, ils vont nous décharger de ce qui est asservissant ;
  • La contribution personnelle deviendra une obligation sociale, on contribuera à hauteur de ses moyens ;
  • Le développement durable passera par une multiplicité d’initiatives locales ;
  • L’être humain aura réglé la majorité des maladies, mais ne sera pas encore hybridé avec la technologie ;
  • L’école travaillera la connaissance et non plus le savoir.

Cette vision 2020 sera probablement impactée par ce que nous vivons actuellement, mais il est certain que la réflexion sur la place de l’humain dans nos sociétés, dans nos entreprises, est un sujet incontournable dans un monde où l’accélération digitale est devenu la norme.

Si vous souhaitez en savoir plus sur le lien entre IA et RH, vous pouvez relire notre article sur le sujet, ou nous contacter.