Profils neuro-atypiques en entreprise : comment bien les intégrer ?

« Si vous êtes toujours en train d’essayer d’être normal, vous ne saurez jamais à quel point vous pouvez être génial ».
Maya Angelou, écrivaine


J’avais déjà abordé ici-même le sujet des profils neuro-atypiques en entreprise avec l’interview d’Hugo Horiot. Pour rappel, ces profils couvrent le spectre de l’autisme, mais aussi les HPI (Haut potentiel Intellectuel), les TDAH (Trouble du Déficit de l’Attention avec ou sans Hyperactivité), les dyslexiques (altération spécifique et significative de la lecture), les dyspraxiques (difficulté ou impossibilité à automatiser les enchaînements moteurs qui se déclenchent normalement à l’évocation d’un but)…

A l’occasion d’une conférence chez Microsoft France, j’ai pu rencontrer Laurence Moszkowicz, Coach professionnelle certifiée, qui accompagne au quotidien des profils neuro-atypiques via sa structure dédiée « Talents Atypiques ».

Après un parcours chez Lagardère et Canal+ où elle accompagnait les choix stratégiques de ses clients dans la prise de parole média, elle décide de se former dans les techniques de coaching, la Programmation neuro-linguistique (PNL)… Elle lance ensuite sa propre entreprise, et de fil en en aiguille, elle finit par se trouver face à des profils atypiques : TDA, Hauts potentiels, TSA (Troubles du Spectre Autistique).

Dans le même temps, elle assiste à une table ronde où des patrons expriment leur besoin de profils qualifiés, avec une pensée créative. Elle renforce donc sa connaissance des profils issus de la neurodiversité, pour bien comprendre les besoins, les spécificités… et accompagne désormais des entreprises sur le sujet de leur intégration. Elle le fait notamment en partenariat avec l’école Simplon et Microsoft, pour le compte de Compéthance (entreprise adaptée et ESN), dans le cadre de l’Ecole IA (intelligence artificielle).  Ses élèves ont d’ailleurs intégré depuis peu de grandes entreprises et ESN, comme Amundi, Expertime, Orange, Renault, Viveris, DataFab… A noter que Laurence Moszkowicz ne travaille pas que pour des entreprises, elle accompagne aussi des particuliers : elle souhaite permettre à des personnes éloignées de l’emploi d’avoir la possibilité de trouver leur place dans le monde professionnel. Cette partie est moins rémunératrice, mais essentielle en termes de sens.

Pourquoi recruter des profils neuro-atypiques en entreprise ?

Tout d’abord, la neurodiversité en entreprise fait écho au besoin croissant de personnes créatives, ouvertes d’esprit… Les neuro-atypiques ont de par leur fonctionnement une « recherche de sens ». Ils savent se poser des questions, ils ont un sens de l’analyse qui répond très bien notamment aux métiers du numérique. Ils peuvent avoir des aptitudes cognitives telles que la mémorisation, le sens de l’observation, une intense concentration, ou des facilités en termes de  langages (notamment abstraits comme le code)…

Ce sont aussi des personnes motivées, du fait de parcours de vie souvent compliqués et d’une nécessité constante de s’adapter. Elles ont développé une résilience et de la détermination.

De plus, ce type de démarche renforce la cohésion d’équipe. Le management de proximité et bienveillance nécessaire à ce type de profil va en effet rejaillir sur tous (à noter que cette approche est tout aussi bénéfique de manière générale dans les organisations).

Quelles bonnes pratiques dans l’intégration de profils neuro-atypiques ?

  • Comprendre l’invisible : quelle est la réalité de ce que vit la personne à recruter ?
  • Accompagner le futur manager : il doit pouvoir travailler son empathie, et bien comprendre le contexte. Il va accueillir une personne compétente, avec une différence. Le « avec » est important car les 2 ne peuvent être décorrélés. Il faut aussi comprendre que la personne qui accueille le profil différent n’a souvent rien demandé, et elle ne sait pas très bien ce que cela peut impliquer
  • Travailler dès les premiers échanges sur la base d’un document co-édité avec le futur collaborateur, issu d’un processus de coaching. La personne y nomme sa différence, et donne des clés d’interaction
  • Etre dans l’humilité, tant du côté du manager que du coach : l’empathie ne pourra pas être constante, il peut y avoir parfois des échecs en termes de transmission de message…
  • Prendre en compte les troubles associés: un profil autiste qui est aussi dyslexique par exemple
  • Anticiper les éléments relatifs à l’anxiété en comprenant les situations où la personne peut être mise en difficulté (lui permettre de faire des points réguliers, lui faire reformuler ce qu’elle a compris, prévoir les réunions…). Ne pas le faire peut renforcer une sur adaptation du profil, qui se créera ainsi un « faux self », et s’épuisera peu à peu pour de mauvaises raisons. Pour cela, il faut comprendre l’écosystème de travail, la mission, l’organisation des équipes… pour rendre le quotidien le plus efficace possible
  • Donner du feedback objectif
  • Trouver le bon rythme d’exécution en donnant des échéances validées par le manager et le profil neuro-atypique
  • Définir les critères d’efficacité : l’intégration de profils autistiques par exemple n’est pas du mécénat, c’est un partenariat destiné à être gagnant gagnant

L’intégration de ce type de profil est aussi en partie facilitée par la montée en puissance récente du télétravail : celui-ci permet pour les neuro-atypiques de choisir les temps d’interaction, de ne pas subir l’aspect social ou la fatigue des transports qui sollicitent leurs récepteurs sensoriels… Et cela génère aussi pour eux un plus grand intérêt pour des temps présentiels qu’ils peuvent choisir, où ils peuvent construire le sentiment d’appartenance, et nourrir leur motivation. A noter que le télétravail nécessite une prise de possession du poste un peu plus complexe.
Avec une sensibilisation à ces bonnes pratiques et un accompagnement adapté, l’intégration de profils neuro-atypiques peut se révéler un réel atout pour l’entreprise !

Alors, prêts à vous ouvrir à la différence ?