« La technologie et le numérique vont être des vecteurs essentiels de la relance. Mais on doit d’abord pouvoir réconcilier le numérique et l’humain, et travailler sur l’inclusion »
Stéphane Richard
Dans une période de crise, il y a deux options pour les entreprises : se replier sur soi, ou accélérer. Orange a décidé d’investir dans la seconde option, comme le montre l’organisation récente de deux événements virtuels d’ampleur, à savoir son OBS Summit (Orange Business Services) et son Salon de la Recherche.
Ils ont été l’occasion de partager les orientations stratégiques du groupe, par la voix de son CEO, de ses partenaires, et de ses chercheurs.
L’un des sujets chauds du moment est notamment la 5G. Nous avions déjà abordé ce sujet avec Michaël Trabbia, Chief Technology and Innovation Officer du Groupe Orange. Stéphane Richard le complète en précisant que pour faire face à la défiance, l’entreprise a pris le parti de la pédagogie, de la sérénité plutôt que du passage en force.
Cela a permis a Orange de commencer à déployer plus sereinement la 5G. A date, ce sont 200 villes et plus de 1300 zones industrielles qui sont couvertes.
Orange construit donc le présent, mais l’entreprise prépare aussi le Futur. C’est ce que nous allons voir avec Nicolas Demassieux, Senior VP Orange Labs Recherche.
Nicolas Demassieux a un parcours assez diversifié : il a été enseignant chercheur pendant 12 ans à Telecom ParisTech, période pendant laquelle il a été amené à travailler avec des industriels. Il a ensuite passé 12 ans chez Motorola, où il a pris différents rôles liés à la recherche, avant de devenir Président de la filiale française.
Motorola vit ensuite un repli, et c’est l’occasion pour Nicolas Demassieux de vivre une expérience en startup, en fondant datsee.com, dédiée au Big Data. Puis en 2010, il rejoint Orange, où il trouve une « recherche équilibrée » entre recherche technologique et recherche sur les usages et enjeux sociétaux du numérique.
Quelle place pour la recherche chez Orange ?
720 personnes travaillent à temps plein sur le sujet chez Orange, dont 140 jeunes Doctorants. 80% des équipes sont situées en France dans plusieurs centres, afin d’être au plus proche des territoires. En termes de répartition, on note 33% de femmes, vs 20% habituellement dans des entreprises équivalentes.
Quelle approche pour la recherche chez Orange ?
80% de la valeur du travail de recherche n’est non pas de trouver des réponses, mais d’identifier les bonnes questions liées à la compréhension d’une technologie et de ses usages. Ces questions sont issues des besoins des clients internes (les business units) et du client final d’Orange.
Cette recherche se fait aussi avec la sensibilité particulière de l’entreprise. Par exemple, là où Huawei nous expliquait aborder la future 6G avec une optique de performance, Orange travaille de son côté à avoir des réseaux « résilients ». Cette réflexion sur les enjeux ne va pas forcément de soi. Si on prend l’exemple de Facebook, on voit que l’entreprise s’est rendu compte trop tard de l’impact de ses produits sur la société, et en paye actuellement les conséquences (frondes, amendes…).
Sur la 5G, Orange a ainsi fait partie des seules entreprises à insister sur l’aspect « réduction de la consommation d’énergie » (notamment en 2015 avec un Salon de la Recherche dédié). L’entreprise est aussi l’un des rares opérateurs dans le monde à investir encore dans la recherche, puisque chez la plupart des acteurs, les marges sont très étroites et ils ont du rationaliser leurs investissements. Orange affirme ainsi sa singularité jusque dans ses équipes, en rassemblant des profils inhabituels, qui travaillent sur des questions de droit ou de sociologie, pour anticiper les évolutions sociétales.
Quels sont les grands sujets traités actuellement en recherche chez Orange ?
Les 3 principaux sujets sont l’intelligence artificielle, la 6G et l’IoT. Et la question des enjeux sociaux y est toujours liée. Mais le point important est que pour faire de « l’éthique », il faut aussi associer une bonne dose de technique. Pour faire une intelligence artificielle éthique, il faut mettre en place des méthodologies techniques applicables à l’international. Cela permet de formuler des engagements réalistes.
Sur la partie « environnementale », ce qui est bon pour la planète l’est aussi pour Orange : grâce à leur approche responsable, ils ont diminué leur consommation électrique globale, et le coût de cette dernière pour l’entreprise.
Bien sûr, tout ne s’arrête pas au mobile. Orange et la France sont ainsi les plus engagés dans la fibre, une technologie 3 à 10 fois plus efficace que l’ADSL et plus efficace que le mobile. Nous ne sommes donc pas près de remplacer les infrastructures physiques par du 100% mobile.
Un exemple récent d’expérimentation ?
On peut citer notamment le « Projet Pixel ». Bordeaux Port Atlantique participe à cette expérimentation centrée sur l’utilisation de l’Internet des objets (IoT) et du « Big Data », pour élaborer les futurs services portuaires numériques, en collaboration avec Orange. Le but est notamment d’évaluer combien un port peut réduire son empreinte environnementale (énergie, pollution) grâce au numérique. Et montrer que même si le numérique a lui-même une empreinte écologique, son utilisation peut aider à améliorer les choses.
Conclusion
Tous ces sujets touchent plus largement à la dynamique de transformation numérique que nous travaillons quotidiennement chez SYSK. Je vous mets en conclusion ci-dessous quelques éléments structurants partagés lors de l’OBS Summit.
– Le Président du MEDEF, Geoffroy Roux de Bézieux, a ainsi insisté sur la placé prépondérante de l’éthique dans cette démarche de transformation.
– Marguerite Bérard, Directrice des Réseaux France et membre du comité exécutif de BNP Paribas, a de son côté pu partager que « près de 90% des collaborateurs de [son entreprise] se disent « à l’aise avec les outils à distance ». Cela veut dire qu’une enquête a été menée sur le sujet, de la même façon que nous le faisons pour nos clients avec notre baromètre de confort digital.
– Pour la DINUM (Direction interministérielle du numérique), le numérique doit être un levier de transformation des pratiques managériales
– L’accélération numérique que nous vivons se voit aussi dans la création de données : en 3 ans, les données ont été multipliées par 3 dans le monde !
– 20% des applications en France sont dans le cloud. D’ici 2025, ce sera 80%
Tout cela nous montre la multiplicité des sujets liés à la transformation numérique, et nous rappelle que le chemin est long, et qu’il ne connaîtra pas de fin !