L’innovation managériale comme levier de résilience et garant de la QVT

« Le premier travail d’un manager n’est pas d’apporter la motivation, mais de supprimer les obstacles. »
Scott Adams

Depuis le début de l’année 2020, nous traversons une période très compliquée avec un haut degré d’incertitude qui plane sur toutes les organisations, petites ou grandes. Dans ce contexte extrêmement volatile, il semble très difficile de réussir à innover, car les conditions ne sont pas réunies : des collaborateurs éparpillés, des consommateurs frileux, une trésorerie au plus bas… Il en résulte une marge de manœuvre très faible qui paralyse les entreprises et les empêche d’innover, du moins d’innover dans le sens traditionnel du terme (lancer une nouvelle offre reposant sur une technologie de rupture). Notre cabinet étant régulièrement sollicité pour travailler sur ces sujets sous le prisme du digital, nous vous partageons notre analyse, construite au fil de nos missions auprès de clients grands comptes.

Nous pouvons tout d’abord noter que l’innovation est plurielle. Elle peut se décliner sous d’autres formes que l’innovation technologique : l’innovation marketing (ex : toucher de nouvelles cibles), l’innovation publicitaire (ex : promouvoir autrement les produits), l’innovation économique (ex : trouver d’autres modes de facturation comme le paiement à l’utilisation), l’innovation dans la distribution (ex : vendre à travers de nouveaux canaux comme les boutiques éphémères ou les places de marché cross-borders)… Il y a également une forme d’innovation dont on ne parle pas assez souvent : l’innovation managériale.

Pour mémoire, le management désigne la mise en œuvre des moyens humains et matériels d’une entreprise pour atteindre ses objectifs. À partir du moment où l’on ne peut pas toucher à la partie matérielle, il est toujours possible de modifier la façon dont sont organisées et dirigées les équipes. Ceci est d’autant plus important en cette période où justement l’organisation est chamboulée par l’impératif du travail à distance. Il y a donc nécessité de s’adapter à une nouvelle réalité de marché et à de nouvelles contraintes du quotidien pour les collaborateurs.

Ceci nous amène logiquement à parler d’innovation managériale dont vous pouvez trouver ici une définition tout à fait pertinente : « Une transformation majeure des pratiques et postures collaboratives entre les managers et les collaborateurs en vue d’évoluer d’une relation parent/enfant à adulte/adulte dans le but de trouver le plus juste équilibre entre épanouissement individuel et performance collective« .

Le point saillant de cette définition est la relation entre le manager et les membres de son équipe, car les pratiques infantilisantes (les « managers hélicoptère ») montrent leurs limites en temps de crise (surtout avec ces innombrables « revues des troupes » par visioconférences).

Innover dans sa façon d’encadrer son équipe implique un changement de posture du manager pour inciter les collaborateurs à s’impliquer davantage et à gagner en autonomie. De façon schématique, nous pouvons identifier six postures qui tranchent avec l’archétype du manager-contremaître :

  • L’authenticité, pour améliorer la confiance (« Vous pouvez tout me dire ») ;
  • L’humilité, pour inciter à la responsabilisation (« Je ne sais pas tout ») ;
  • L’aventure, pour développer le plaisir et l’engagement (« On va le faire ensemble ») ;
  • La serviabilité, pour valoriser l’entraide et l’intelligence collective (« Je suis là pour vous aider ») ;
  • La justesse, pour stimuler les pratiques agiles (« Organisez-vous pour que ça fonctionne ») ;
  • La résilience, pour encourager la créativité, le droit à l’erreur et valoriser les échecs (« Je ne vous reprocherai jamais d’essayer »).

Outre la posture du manager, il y a également une remise en question à faire au niveau des modèles de management, car nous sommes encore bien trop souvent dans une configuration pyramidale où le chef décide de tout et fait redescendre les objectifs sur les sous-chefs qui les répartissent entre les salariés. Un grand classique du management unidirectionnel du XXe siècle qui fonctionnait bien pendant les Trente Glorieuses, mais qui est devenu à la fois anachronique et déplacé dans le contexte des années 2020 (économie à croissance nulle, symétrie des attentions, besoin d’accomplissement professionnel…).

Au cours de la décennie passée, un certain nombre de modèles de management innovants se sont illustrés :

  • La néo-agilité à travers des pratiques de management visuel (méthode de gestion qui repose sur un ensemble de supports visuels pour communiquer des informations, prendre des décisions, organiser et répartir le travail au sein des équipes) ;
  • Le lean management appliqué en dehors du secteur industriel (système d’organisation du travail qui vise à améliorer la qualité en continue ainsi que la productivité en luttant de façon systémique contre le gaspillage des ressources) ;
  • L’effectuation (partir des ressources disponibles pour définir des objectifs et non l’inverse) ;
  • L’holacratie (management horizontal où l’autorité et les prises de décisions sont distribuées sur l’ensemble de la structure, à des individus ou à des collectifs)…

Certes, ces modèles sont en rupture avec le management traditionnel, mais la période est suffisamment critique pour que l’on cherche à faire évoluer le fonctionnement de l’entreprise. Les principaux enjeux de cette évolution sont à court terme la résilience (être en mesure de passer la période de crise sanitaire et de s’adapter aux conséquences à venir : crises économiques / sociales…), et à moyen terme la qualité de vie au travail. Car les conditions de marché très favorables pèsent sur le moral des équipes et surtout obscurcissent leur horizon professionnel. Pour y remédier, il faut changer les méthodes et habitudes de travail (s’adapter aux nouvelles contraintes) et adopter de nouveaux modèles de management.

Si nous sommes tous d’accord pour reconnaître que personne n’aurait pu prédire la crise sanitaire, voilà plus d’un an que le travail à distance est imposé aux entreprises, une pratique adoptée dans la précipitation et qui épuise les collaborateurs et nuit fortement à leur moral, et perturbe leur productivité. Pour appuyer mon propos, je mentionne cette définition de la QVT : « La notion de qualité de vie au travail désigne toutes les actions qui permettent de concilier à la fois l’amélioration des conditions de travail pour les salariés et la performance globale des entreprises, d’autant plus quand leurs organisations se transforment. »

Pour résumer : nous avons un marché complètement chamboulé qui force les entreprises à revoir leur organisation et méthodes de travail, qui implique nécessairement une évolution des modèles de management, ceci dans le but d’améliorer le bien-être et l’engagement des collaborateurs, donc leur performance.

L’innovation managériale est directement liée à des préoccupations bien réelles qui sont abordées à travers les missions que nous menons pour nos clients : les outils et pratiques de gestion de la qualité et de mesure de la performance pour une banque de crédit, l’appropriation et la mise en oeuvre opérationnelle de pratiques agiles au sein de la cellule « Transformation digitale » d’un Ministère, l’autonomisation des équipes marketing dans le cadre d’un projet Direct-to-Consumer pour un laboratoire pharmaceutique… le dénominateur commun de ces missions est le modèle de management : passer d’une logique « Command & Control » à « Engage & Align« .

Reste la question de l’impulsion initiale, à savoir qui doit porter cette innovation : la Direction ? Les RH ? Les managers ? Les équipes elles-mêmes ? Sur ce point là, il n’existe pas de vérité absolue, car l’important est d’une part de se rendre compte que les modèles de management du XXe siècle sont devenus inopérants ; et d’autre part, que les nouveaux modèles sont maintenant bien maîtrisés et correspondent à un réel besoin d’émancipation des collaborateurs.

Si vous souhaitez en savoir plus sur notre vision de l’innovation managériale ou la façon dont nous l’avons abordée chez nos clients, n’hésitez pas à nous contacter pour pouvoir échanger sur nos retours d’expériences.

Sources de cet article :
– Livre de Francis Boyer « L’innovation managériale en action »
Les managers hélicoptères